15 Septembre 2012
"Sans Vézelay, le monde perdrait une lumière, l'Europe un de ses hauts lieux, et nous, petit peuple de Dieu ? Il n'y aurait donc plus de révélation, plus d'inspiration, plus d'âme, plus rien ? Notre province ne compterait plus que par Vauban, génial militaire, ou par Chaissac, minuscule cordonnier d'Avallon devenu à sa mort immense peintre loufoque, ou encore par des pots de moutarde, des fromages de chèvre, du vin blanc sec ou des sabots ? Vézelay n'est pas seulement un sanctuaire chrétien bâti sur les vestiges d'un temple à Janus et dans une tradition cosmique d'adoration. Hissé bloc après bloc, à force de bras, de poulies et de treuils sur des milliers de tonnes de pierres que les piliers et que les arcs soutiennent en un fragile équilibre, Vézelay a lutté contre dix siècles en mesure de temps, deux ou trois fois contre le feu, et jaillit encore comme une énorme fleur minérale qui célèbre la résurrection, et cela seulement. Avec ses précieux restes que d'innombrables multitudes de chrétiens sont venues de toute part honorer, qu'elles ont voulu toucher aussi, comme on s'accroche à une bouée qui vous maintient à flot, vous sauve et vous tire de l'abîme, Vézelay est une affirmation. On va à Vézelay comme vers la lumière et le soleil. Vézelay, c'est le matin de Pâques. - Jules Roy, "Vézelay ou l'amour fou", Albin Michel/Champ Vallon, 1990.