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Le blog de Tout n'est que litres et ratures par Roger Feuilly

Au quotidien, la cuisine selon les saisons, les vins selon l'humeur, la littérature qui va avec, les bistrots et les restaurants, les boutiques qui nourrissent le corps et l'esprit, bref tous les plaisirs de bouche et de l'âme.

Message personnel à un ami curieux : endive, chicorée, chicon et witloof, ça vous dit quelque chose ?

Chicon.jpgC’est un mois de mars de l’hiver 1879 que les pavillons Baltard des Halles de Paris reçurent les premiers cageots en provenance de Belgique d’une plante potagère que peu de personnes connaissaient à l’époque. Le nom qui y est indiqué reste mystérieux : « Witloof », dont l’étymologie se compose de « wit » (« blanc ») et loof (anciennement « feuillage ») et que l’on ne peut expliquer avec exactitude. Le synonyme principal est évidemment « endive », terme générique par lequel on désigne les chicorées et les scaroles qu’on cultive en vue du forçage dans l’obscurité pour empêcher la photosynthèse, et ainsi obtenir des feuilles blanches à bords jaunes et de goût amer. Le nom scientifique est « cichorium intybus convar foliosum. « Chicon », qui est masculin, est utilisé dans le nord de la France, en Wallonie et à Bruxelles, alors que « witloof » est féminin, dans le nord de la France, en Flandre et à Bruxelles. Mais l’histoire nous rapporte que les premières pousses furent récoltées vers 1850 dans la banlieue bruxelloise, à Evere (longtemps considérée comme la patrie du chicon), à Haren et à Schaerbeek, trois communes bruxelloises, à l’époque vouées aux cultures maraîchères. A côté de leurs champs de pommes de terre, de betteraves rouges, de froment, les paysans récoltèrent aussi des racines de chicorée sauvage qu’ils utilisaient pour leur café à la place de café. L’un d’entre eux, Jan Lammers, s’aperçut un jour que ces racines abandonnées derrière une grange s’étaient mises à germer de longues pousses accompagnées de petites feuilles d’un blanc jaunâtre. Il en consomma puis, les trouvant comestibles, se décida de les vendre sur les petits marchés matinaux de Bruxelles. Il les proposait sous le nom pittoresque de « barde capucin » ou de « pissenlit ». Ce fut un succès. D’autres maraîchers suivirent son exemple. La forme n’était pas celle que nous connaissons aujourd’hui : c’est un éminent botaniste belge, Brézier, chef-jardinier de la Société d’Horticulture Belge - qui fût à l’endive ce que Parmentier fût à la pomme de terre – qui s’y intéresse et parvient à en améliorer la production et la qualité. C’est à son initiative que les premiers cageots de « witloof » furent présentés à Paris grâce à l’intervention d’Henry de Vilmorin, le grand botaniste français. En ce mois de mars 1879 d’ailleurs, la plupart des marchands des Halles, trouvant que le nom était trop difficile à prononcer, l’avait surnommée « chicorée de Bruxelles ». Bon appétit et large soif !

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