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Le blog de Tout n'est que litres et ratures par Roger Feuilly

Au quotidien, la cuisine selon les saisons, les vins selon l'humeur, la littérature qui va avec, les bistrots et les restaurants, les boutiques qui nourrissent le corps et l'esprit, bref tous les plaisirs de bouche et de l'âme.

François Mitterrand et le cuisinier de Vialas, Patrick Pagès, ça vous dit quelque chose ?

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Lartetlamanieredebienmanger.jpgA Sainte-Eulalie, en Corrèze, Patrick Pagès, cuisinier au restaurant « Chantoiseau » à Vialas au pied du Mont-Lozère, qui nous a malheureusement quittés, est à un repas de famille comme parrain d’une petite fille, Marie-Margeride. A ce repas, il y avait aussi François Mitterrand, alors Président de la République, auquel il propose une promenade aux champignons. Ils la firent ensemble pendant une heure. Patrick Pagès raconte : « Nous avons trouvé beaucoup de champignons vénéneux, des champignons splendides. Plus c’est beau, plus c’est vénéneux. Bref, il y avait de l’amanite tue-mouche partout. Nous eûmes droit à une symphonie de couleurs faite de rouge, de blanc, de vert ; aux sautes d’humeur des couleurs du vert bleu irradié par les pins aux lumières rasantes du soleil de fin septembre sur la Margeride. Et ces pigmentations brunâtres avec les pignes et les dorés parachevaient le tableau avec çà et là des champignons posés là, comme par hasard. Avec le Président, nous étions en admiration face à la nature qui nous comblait. Plus tard, le moment venu de prendre l’hélicoptère, il m’a dit : « Monsieur Pagès, je viendrai vous voir ». J’ai rencontré bien des gens qui m’ont promis. Je n’en ai pas rencontré qui m’aient offert leur 8 mai sauf un : le Président François Mitterrand ». Et, en effet, il vînt. Précisément, le 8 mais 1987. Patrick Pagès raconte cette journée dans son livre, co-écrit avec Edouard Boeglin, « L’art et la manière du bien-manger, lexique gourmand mitonné en Languedoc-Roussillon » (Editions Lacour-Colporteur) : « Il m’avait dit qu’il viendrait, il est venu. Il ne me devait rien, moi non plus d’ailleurs. Une folle journée que ce 8 mai 1987 où nous nous sommes beaucoup amusés. Il m’arrive de penser que ce 8 mai, le Président de la République avait bien d’autres obligations, bien d’autres personnes à voir. Le 8 mai, journée symbole, jour de victoire. Ce haut personnage ne fonctionnant que par symbole, j’ai donc à trouver la signification de celui-ci. Etait-ce une victoire pour moi ? D’une certaine manière, c’était… Départ de Paris à 12 h 30 pour Montpellier où l’attendait l’hélicoptère présidentiel ; direction La Croix de Berthel. De là, une voiture l’a mené à Chantoiseau. Il est arrivé tout-à-fait à l’improviste. Je ne savais pas que le Président de La République venait. Certes, une table était réservée « pour une personnalité célèbre ». Le jour de la réservation, la veille en l’occurrence, je faisais des photos pour un journal, quelque part dans la montagne. C’est Christiane, ma femme, qui a reçu un appel téléphonique : « Demain, il faudrait réserver une table de cinq couverts pour un personnage important qui passera à table un peu tard ». Bon. Christiane répond par l’affirmative, s’enquiert : « Préférez-vous le salon ou la salle ? » « Non, non, dans la salle… » De retour de ma séance photos avec Jean-François, le photographe, je me suis demandé qui cela pouvait être. J’ai pensé un instant au Président Giscard d’Estaing avec Jacques Blanc. On savait qu’ils étaient complices (cela a bien changé depuis). Pourquoi ne se retrouveraient-ils pas à Vialas ? La chose me parut finalement peu probable : je n’ai jamais eu ce genre de relations ni avec Jacques Blanc, ni avec Giscard que je ne connais pas. J’ai pensé à Georges Marchais et au maire communiste d’Alès pour une commémoration maquisarde. Ou encore : « C’est peut-être Alain Delon entouré de gardes du corps ? ». Tout cela me paraissait de moins en moins plausible mais au temps de Madonna, l’impossible est au coin de la rue. Comme chaque matin de 8 mai, défilé aux morts. J’assiste au défilé. Curiosité : pas de gendarmes à un défilé à Vialas. J’échange quelques mots avec le Maire : « Oui, j’ai une table particulière qui vient manger mais je sais pas de qui il s’agit ». Le Maire sachant que je connais le Président, me dit : « C’est pas lui au moins ? ». Je ne le pensais pas. De toute façon, lui c’est lui et moi c’est moi (air connu). Donc je vais servir l’apéritif en bas. Le Maire me souffle : « S’il vient, vous me le dites ! ». Allons bon. Finalement, voilà ce qui s’est passé : vers une heure, je « coince » l’une des personnes qui attendaient la personnalité en question et je la pousse dans mon placard à musique fort opportunément ornementé d’une photo du Président aux champignons. La personne l’aperçoit, sursaute. Moi c’était toujours moi, mais « lui », c’était bien « lui ». – Bon appétit et… large soif !

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