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Le blog de Tout n'est que litres et ratures par Roger Feuilly

Au quotidien, la cuisine selon les saisons, les vins selon l'humeur, la littérature qui va avec, les bistrots et les restaurants, les boutiques qui nourrissent le corps et l'esprit, bref tous les plaisirs de bouche et de l'âme.

Service des objets truffés, ça vous dit quelque chose ?

Service des objets truffés, ça vous dit quelque chose ?
Service des objets truffés, ça vous dit quelque chose ?
Service des objets truffés, ça vous dit quelque chose ?
Service des objets truffés, ça vous dit quelque chose ?

La truffe dite « tuber melanosporum » ? Elle est très recherchée par les cochons et par certains chiens. Elle est également prisée de beaucoup d’humains. On ne sait pas encore grand-chose d’elle sinon qu’elle parfume tout ce qu’elle touche et que ce parfum-là a un prix. 

La truffe, elle a une odeur de fruit défendu et fait mentir la Bible. Tout l’indique en effet. Son paradis d’abord. Entre 44° et 46° de latitude nord, il comprend le Comtat, le Haut-Languedoc, le Bas-Vivarais, le Dauphiné et le Périgord. Son mystère ensuite. Elle grandit et se cache sous la terre au pied de chênes pubescents, sans qu’aucun scientifique ne sache encore vraiment ni pourquoi ni comment.

Elle est le fruit d’un champignon souterrain qui pousse à proximité d’un chêne. Ce champignon est une sorte de toile d’araignée faite de petits filaments blancs qui sont reliés aux racines de l’arbre : on dit alors que la truffe est mycorhisée. Ce champignon apporte à l’arbre des sels minéraux qu’il puise dans la terre. L’arbre donne des sucres qu’il fabrique par photosynthèse. 

Don du ciel – ou de la foudre – comme le croyait Plutarque. Ou encore cadeau empoisonné du diable. De par sa sensualité enfin (on a recensé des truffes à Lesbos), avec son parfum puissamment musqué de péché originel auquel on prête des vertus aphrodisiaques. « Elle peut, en certaines occasions, écrivait Alexandre Dumas, rendre les femmes plus tendres et les hommes plus aimables. » 

Jean-Louis Martz – qui dirigeait jadis « La Maison de la truffe » à Paris, glissait malicieusement : « Elle se mange à deux, avec tout ce qui va autour et vient après. » Une truffe pour « toi et moi » en quelque sorte. D’autant qu’elle n’est pas si chère que cela quant on sait que 25 grammes suffisent largement à faire de vos œufs brouillés (pour deux bien sûr) un plat exceptionnel et qu’une truffe placée avec œufs frais dans un récipient hermétiquement clos vous donnera les meilleurs œufs coque du monde. 

Mais quid des prix de la truffe fraîche en cette année ? Ils varient considérablement, jusqu'à 1.000 € le kilo et plus en boutique ou par correspondance, selon la qualité évidemment et l’endroit. Et chaque année, au moment des fêtes, c’est la même antienne : celle de prix qui augmentent partout, ne diminuant qu’un petit peu au début de l’année suivante, alors que les truffes sont réputées bien meilleures en janvier et février (la vente s'effectue de mi-novembre à début mars). 

Et qu’en est-il aujourd’hui du parc de truffières ? Dans les années 80-90, l’empereur de la truffe à Cahors, Jacques Pebeyre, disait alors : « Elles ont été mal replantées et le reboisement en résineux a fait pas mal de dégâts. » Quant à la conserve, on sait que le regretté Roger Lamazère, qui tenait une ambassade du sud-ouest à Paris (23, rue de Ponthieu, 8e), avait breveté un procédé de conservation avec de la graisse d’oie dès 1967. Il pensait que chez les conserveurs, la truffe perdait 80 % de son parfum. Jean-Louis Martz était d’ailleurs du même avis : « La plupart des conserveurs maltraite le produit. Ils pratiquent une première ébullition dans de grands pots après la récolte et, pour répondre à la demande, une seconde ébullition est réalisée en petits pots. Cette double ébullition entame considérablement l’arôme. 

Chez « Pebeyre » - et chez « Plantin » dans le Vaucluse, on reconnaît qu’effectivement la truffe perdra de 20 à 25 % de son poids. Quant à la truffe de culture, malgré quelques expériences, ce n’est pas encore vraiment pour aujourd’hui. On a bien réussi à ensemencer des plants de chênes avec des spores de truffes. Les chênes sont ainsi de fait mycorhizés et peuvent créer le contact avec ce fameux mycélium à l’origine de la truffe. C’était une expérience que l’on connu avec l’INRA sous l’égide de deux scientifiques, Gérard Chevalier à Clermont-Ferrand et Jean-Marc Olivier en Gironde qui avait breveté un procédé d’inoculation des arbres qui avait été cédé à une société girondine, « Agri-Truffes » à Saint-Maixant près de Langon. Les premières truffes avaient alors été récoltées sur des chênes de cinq ans chez un parent de Teilhard de Chardin à Luzillat dans le Puy-de-Dôme. On lira avec intérêt un ouvrage collectif dans lequel ses deux chercheurs ont pris leur part, « La Truffe », où il montre qu’il n’existe pas une seule manière de cultiver la truffe, ni même de recettes miracles, mais différentes solutions techniques qui dépendent des conditions environnementales. Ce guide technique devrait permettre à chacun de raisonner les pratiques culturales selon sa propre situation, et apporte des recommandations précises pour la réussite et la pérennité de la plantation ainsi qu’un complément d’information permettant d’approfondir certains points comme l’observation d’un profil de sol appliqué au diagnostic truffier et la connaissance des espèces. 

Mais mieux vaut encore se fier aux bonnes vieilles méthodes. Le ramasseur, que l’on nomme « rabassier » ou « caveur », utilise plus fréquemment le porc mâle ou la truie, voire même le chien qui est aussi fréquemment le complice du braconnier la nuit au clair de lune. La chasse se fait au vent en aspirant les émanations de la truffe mûre, souvent de très loi, environ de quarante à cinquante mètres. La bête ira directement à la truffe et le rabassier devra faire attention à ce que celle-ci n’aille pas dans l’estomac du chasseur. Il ne vous reste donc plus qu’à la consommer sans trop de scrupules en méditant la réflexion d’un grand amateur : « Il y a deux races de mangeurs de truffes : l’une qui croit que les truffes sont bonnes parce qu’elles sont chères, l’autre qui sait qu’elles sont chères parce qu’elles sont bonnes. » -

Bon appétit et large soif !

Des adresses où l’acheter en Province et la manger à Paris en sachant que lorsque vous avez la classification extra, ce sera une truffe sans défaut d’aspect, au nez très développé, et dont le poids est supérieur à 30 grammes : « Le Griffonnier », pour sa tartine à la truffe sur pain Poilâne (lire sur http://www.toutnestquelitresetratures.com/article-la-truffe-don-de-dieu-ou-diable-mais-en-tartine-au-griffonnier-c-est-tellement-bon-113447734.html).

- Le Griffonnier - 8, rue des Saussaies (8e). Tél. : 01 42 65 17 17. Fermé samedi et dimanche, déjeuner seulement, sauf dîner le jeudi.

– « L’Evasion », pour le foie de veau (photo) ou la côte de veau et la purée de pommes de terre largement truffées. 7, place Saint-Augustin (8e). Tél. : 01 45 22 66 20. Fermé samedi et dimanche.

– « Michel Rostang », pour son sandwich à la truffe (photo). 20, rue Rennequin (17e). Tél. : 01 47 63 40 77. Fermé samedi au déjeuner et dimanche.

- La Table de Sébastien Gravé. (Bayonne). 21, quai Amiral-Dubourdieu. Tél. : 05 59 46 14 94.  Côte de veau de La Bastisde-Clairence (élevage des Pyrénées Atlantiques). 

- « Jacques Pebeyre », depuis 1897. 66, rue Frédéric-Suisse (46000 Cahors). Tél. : 05 65 35 24 80. – Site : www.pebeyre.com

- « Société Plantin », depuis 1830. Route de Nyons (84110 Puyméras). Tél. : 04 90 46 41 44. Site : www.truffe-plantin.com

– * « La Truffe », de Jean-Michel Ricard (Ctifl), François Bergougnoux (Ctifl),
 

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